« Il va falloir qu’on parle, tu sais ?… »

Si je le savais !… Ça ne faisait guère que trois mois que c’était ma hantise ; que je me réveillais en pleine nuit à l’idée que l’échéance approchait, inévitable. LA discussion rampante, serpentait dans ma tête à m’en faire exploser les synapses. Au bout d’un moment, on ne sait plus si on espère encore un sursis ou si on aimerait autant en finir au plus vite. Apparemment, le serpent était enfin dressé et prêt à mordre une bonne fois.

« Je ne sais pas combien de temps ça va durer, mais il va bien falloir que j’y aille…
– J’ignore s’il “ faut ”, je sais que je ne veux pas. »

Le cri du cœur ; c’était sorti sans que je l’ai entendu venir. Je ne voulais pas ; je voulais avoir dix ans de moins et qu’elle me borde encore le soir, je voulais beaucoup de chose, mais pas être cet ado perché sur ses quinze ans, au visage grêlé qui va voir partir sa mère et qui se sent démuni comme s’il en avait cinq. Je ne voulais pas. Et puis on a parlé ; enfin j’ai écouté Maman m’expliquer les espoirs, les progrès et le bon Dieu qui doit bien servir à quelque chose. Je lui ai promis que je prierai ; ça faisait longtemps que ça ne m’était pas arrivé. Ni de promettre sincèrement, ni de prier.

Elle est partie lundi pour cet hôpital. Bien sûr elle n’en est pas revenue ; bien sûr je n’ai plus jamais prié – définitivement pas rentable. Et pourtant, si j’avais prié assez fort à l’époque, peut-être que…


Je suis encore en sueur. J’ai dû gueuler comme un âne. Cunégonde me regarde de ses grands yeux étonnés. Je la caresse doucement. Elle se rendort rassurée. Il est trois heures du matin ; je ne dormirai plus cette nuit.


Premier «vrai » billet de ce blog, sur une amorce envoyée par jj coqueluche et dont j’ignore pour l’instant la source. Merci à elle, merci à vous de m’avoir lu, et à vous d’envoyer le prochain lancement.