Et puis Stéphane, quoi !… Elle lui avait promis une soirée entre filles pour l’aider à se remettre de sa sale rupture avec Sofia. Traiter une vieille copine de fieffée salope est un plaisir de fin gourmet auquel il est difficile de résister, surtout auprès d’un garçon aussi miaoumiam que Stéphane, qui n’avait pas hésité à promettre à Marie sa grande spécialité, en direct du kebab, arrosée d’une boisson pleine de bulles à la composition transmise de père en fils dans une usine lointaine.

Bref, une soirée entre filles exceptionnellement mixte et pleine de promesses à laquelle l’aventureuse Domi l’avait arrachée sans pitié. Pour aller demander, troquet après troquet, se sentant un peu plus minable à chaque rade – en raison des chances de succès s’amenuisant ou de l’alcoolémie s’emballant ? Elle n’aurait plus su dire après le troisième verre – et il y avait eu nettement plus de trois établissements. En perdant sa mixité (et ses guillemets), la soirée entre filles avait quand même tourné un brin en eau de boudin.

Et voilà comment on finit à trois heures du mat’ en train de beugler comme une pochetronne au milieu d’un débit de boisson douteux rue Pigalle. Parce que, bien sûr, il faut que le périple se termine dans le neuvième, et pas dans l’avenue Matignon, ce serait trop facile, sinon. Et il faut, sinon ce ne serait pas drôle, que Marie soit prise d’une inspiration vengeresse envers la gent bistrotière au moment pile où la patrouille de police descend la rue. Parce qu’il faut bien l’admettre : quoi de plus glamour que de finir la nuit en cellule de dégrisement ?

Quelques heures pour faire le point. Aussi douée que soit Domi, aussi pointue sa capacité d’interview peaufinée en dix ans de sondages téléphoniques, on ne rattrape pas un professionnel de la dissimulation comme Serge aussi facilement que ça. Un gars capable de simuler sa propre mort – mieux, de te faire croire que tu l’as refroidi – ne laisse bêtement une trace suivable au bistrot. Et finalement, pourquoi essayer de le rattraper ? Elle l’avait voulu mort, quel besoin aurait-elle de s’assurer qu’il est en vie.

Bien sûr il y a la robe, bien sûr il y a Talie, et, à n’en pas douter, toutes les héroïnes du répertoires de sa Natalie, planquées dans les ports de ce marin au grand air, mais MERDE ! Elle ne lui en a pas assez donné ? Elle n’en a pas assez bavé pour en redemander encore ?

Comme quoi on a parfois des inspirations à cinq heures du matin dans les geôles d’un commissariat de quartier. Elle le sait maintenant, elle doit se sevrer, abandonner ce sale type à son sort – et l’espérer triste. Elle n’a qu’une vie, Marie, et n’aurait jamais dû se laisser bercer de l’illusion de pouvoir en vivre plusieurs à travers les yeux d’un collectionneur monomaniaque. Et puis l’opéra pendant l’amour elle en a sa claque, là.

Le seul truc qu’elle n’aurait pas voulu perdre, finalement, c’est la robe…


To be continued :-D

C’était ma participation aux matriochkas lancées par la fée frappée Kozlika. C’est donc le chapitre onze d’une histoire qui en compte treize, mais dont les chapitres 4 à 10 restent à écrire, suivez l’évolution du lien ci-dessus pour avoir l’histoire complète (dernier chapitre le 12 juin).

On retrouve la fine équipe habituelle très bientôt ;-)