En même temps, j’en ai toujours rêvé, d’avoir un endroit, un toit qui m’appartienne vraiment. Et puis c’est de ma faute, à moi, si à peine arrivé, je reçois un message me rappelant que je n’ai plus qu’une semaine pour faire valoir mes droits sur la maison de ma grand-mère ? J’ai quand même un peu eu autre chose à penser, ces derniers temps !

Il le fallait bien, alors j’ai fini par en causer au gamin ; essayé de trouver les mots pour lui faire comprendre que je devais remonter à Paris signer les papiers chez le notaire, que derrière, il faudra racheter les parts des cousins, qu’il y aura des frais, des travaux ; que vu qu’en plus ils mettent le kilomètre au prix du caviar depuis que c’est possible, je n’étais pas bien sûr de pouvoir redescendre dans la foulée. Que la recherche de ses vieux je la lui dois – mais que cette maison c’est aussi beaucoup de mon histoire, même si elle ne paye pas de mine, coincée dans cette impasse de Montrouge… et que je ne peux me résoudre à la voir passer au bulldozer (ce qui l’attend tout à fait sûrement si je l’abandonne aux affreux cousins) ; qu’il faut être con comme un adulte pour être aussi attaché à quatre pauvres murs et un maigre bout de jardin, que…

Il attend que j’ai fini, que je ne sache plus rien faire d’autre qu’attendre sa réponse. Une attente qu’il prolonge ; il me regarde avec sérieux et comme une interrogation, qu’il finit d’ailleurs par formuler :

– Mais tu yoyottes complètement, ma parole !
– Heu… Je comprends que tu sois déçu mais cause-moi correc’, quand même, je…
– Nan, mais je veux dire, les parts, les frais, les travaux et le dentier de ta cousine, là… c’est quand même pas ça qui t’inquiète ?!
– Aussi étonnant que cela puisse paraître au vu de mon opulent Livret A, si, précisément, ça m’inquiète. C’est le mot juste.
– Tu as une mémoire de poisson rouge, alors : tu as oublié que j’ai une sérieuse réserve !

Il me brandit sa carte bleue.

– Je ne conteste pas que tu as à ta disposition un peu plus d’argent de poche que pas mal de gens de ton âge, mais…
– Mais tu n’as aucune idée de la réserve qu’il y a au bout de cette carte, mon vieux. Largement de quoi éponger ce petit épisode !
– Tu ne sais pas de quoi tu parles, on parle de sommes sérieuses, là, tu…
– … ne sais pas compter, bien sûr !
– Ne t’énerve pas, je veux juste dire que…
– Je ne m’énerve pas, j’aimerais que tu me fasses un peu confiance ! On est deux dans cette affaire, alors arrête de faire comme si j’étais trop jeune pour avoir un cerveau et savoir ce que je dis. Je te dis ceci : je ne crois pas que tes « frais » dépassent le million d’euros et je peux m’en occuper.
– Le mi… le mi…
– Ouais, comme à la télé : Le million ! Le million ! Alors, on reste encore trois jours pour faire le point de ce qu’on peut trouver ici, on remonte et tu me dis de combien t’as besoin, d’accord ?

J’ai dû acquiescer pour éviter de rajouter un mi… ; il me les aura toutes faites, le Renan.


Épisode abominablement en retard pour cause de mauvaise organisation personnelle, mais je m’étais promis de ne pas sauter cette semaine et c’est maintenant chose faite. On remercie chaleureusement l’ami Franck Paul pour son amorce rebondissante, dont il ne tardera pas à nous donner la source, je le sais je le sens :-)

À vous de jouer, lâchez vos amorces \o/