Quartier libre
Par Lomalarch le mardi 15 novembre 2005, 14:47 - La saga de l’été 2005 - Lien permanent
Amar parle le djeuns’ couramment – même si sans doute une version âgée de quelques années. Il explique à nos Turcs que Michel a entièrement bâti sa maison en partant littéralement d’un tas de cailloux et d’un reste de murs s’élevant peut-être à cinquante centimètres. La maison de pierre, que Michel m’a fait visiter hier, comporte trois niveaux. L’escalier qui monte au premier étage est constitué de traverses de chemin de fer, et il n’y a pratiquement pas deux fenêtres identiques : récup’, bon sens, talent. Et il sculpte, encore – avec entre autres des tiges de fer à béton. Maire de Tanaron… sachem de Tanaron, oui !
Grâce au descriptif du projet, j’ai pour la première fois des éléments précis sur ce que Marie attend de chacun, et j’ai donc une piste sur c’est quoi c’est que j’fous là. Mon rôle sera de préparer les jeunes à jouer dans le film. Une « formation accélérée » en séances quotidiennes (deux heures minimum, le chantier occupera maximum trois heures par jour)…
Le chantier ?
J’interromps à nouveau ces notes de l’été, car je ne crois pas vous avoir parlé du chantier[1]. Avant de tourner, il est en effet prévu de relancer les travaux initiés quarante ans plus tôt par les gamins d’alors. Et si nous avons tous été appelés autour d’un projet « cinéma », celui-ci a en fait été lancé plus tôt que prévu. Était initialement prévu pour cet été un chantier de nettoyage, car, en quarante ans, de peu glorieux vestiges de notre société du gaspillage de consommation ont envahi le village[2].
Vous n’avez pas fini d’entendre parler du chantier, t’manière, vu qu’on en est plutôt fiers – mais
n’anticipons pas. Retour donc aux notes prises sur place[3].
La cuisine, c'est facile !
On se met mollement en route pour la bergerie, après le retour de l’équipe courses. À table à… 17 heures, avec une salade de riz de la veille. On découvre que nos musulmans mangent Hallal. On avait prévu d’éviter le porc, mais du coup on se retrouve avec des stocks d’aliments carnés qu’on ne va pas pouvoir se partager, dont d’ineptes tranches de « jambon de dinde ». Et rien ne dit que ce sera facile de trouver des viandes Hallal à Digne – qui n’est pas la plus grande ville de ce département désert.
Quartier libre, c’est bien gentil, mais Murat et Yasin ne sont pas vraiment inspirés par cet endroit, « vide » dans leurs yeux urbains. Ils ont besoin d’oxyde de carbone. Marie ne prêtant pas sa voiture, ils décident de descendre à Digne à pied. On les remontera ce soir, les autres arrivant à 22 heures. Douze bornes à pied, sous un soleil d’août. M’est avis qu’ils ne se précipiteront pas pour recommencer. Ils ne mangeront pas avec nous ce soir, qu’ils aient ou non dîné en ville. Michel et Marie prévoient d’accueillir les nouveaux au village, juste avec les copains, pour atténuer le « choc culturel » et permettre une immersion par palliers. Après le repas, on se fait un feu de bois. Et on les attend pour faire une veillée d’enfer ! Mais Fouzi et Aline[4] sont fatigués et entendent préparer leur coucher. Les jeunes, désormais plus en force, puisqu’à quatre, sont d’humeur plus folâtre et Murat m’interpelle à tout bout de champ : « Wesh Noé ! » Ça va devenir son cri de guerre pour les deux jours à venir.
Ici s’arrêtent mes notes « au jour le jour » de l'été. La suite sera donc reconstituée de mémoire, ce qui s’annonce plus riche encore en approximations, mais enrichi par le recul acquis en quelques mois…
À bientôt, donc, pour la suite de mes palpitantes aventures tanaronaises ;-).
Notes
[1] en même temps, il me semble utile de préciser de que, jusqu’à ce matin, c’était assez flou, même pour moi.
[2] il va être inévitable, je le sens, d’ouvrir une rubrique politique sul’ joueb…
[3] note pour plus tard : t’as passé trente ans, boudiou, il serait peut-être temps d’apprendre à écrire lisiblement !
[4] hé oui, vous avez bien compté, il en manque encore un par rapport à ce qui nous était annoncé – et ça nous fait un couple de plus dans le dortoir
Commentaires
Voilà, voilà
Heu... dites, je ne voudrais pas faire celui qui « pousse à la consommation », mais je suis un peu en manque de retour sur ce joueb. Si vous ne voulez pas poster de commentaires, vous pouvez m'écrire, mais j'aimerais vraiment savoir si ça peut intéresser quelqu'un, ce que je raconte...
Merci de votre soutien et à bientôt.
Si on considère qu'une personne suffit au maintien du joueb, alors continue. Mais cette personne c'est moi, alors ça change tout. En tout cas moi, ça m’intéresses, et ça m’intéresserait aussi d’en savoir plus, de savoir si main d’œuvre il y a besoin, ou autres.
Enfin voilà, je retourne à ma lecture.
Non mais.
Je découvre la hutte à Ceskal par mes stats qui me disent qu'on vient me voir de là-bas !
J'en suis d'autant plus ravi que se dégage de ce blog un brin foutraque une atmosphère vraiment sympathique – et hop ! un lien de mieux
Et merci pour le com' ! Oui, un retour comme ça suffit à me faire penser que ce que je fais n'est pas vain, puisque ça attire l'attention sur un projet que je crois valab'
Je crois que j'aurais continué t'manière ;-), mais je n'hésiterai pas à te transmettre personnellement les appels à coup de main, car il y en aura !
Maintenant qu'on en sait un peu plus sur le groupe, le projet et votre installation, tu nous racontes ce que c'est que ce village ? Dis... S'il te plaît... :*
Wéé ! Un copain de plus
Mais heu, le blog, tu l'alimente de ou ? Y'a l'internet par la bas ou tu est ?
Huhu
Alors Ceskal, Titi, c'est mon amour de moi (et c’est une fille, en fait)
Et « par là-bas où je suis » c’est à mon chez moi, oussque je suis revenu depuis septembre, à Saint-Denis dans le 93 – et, oui, il y a l’internet
…
Titi > tu lis dans mes pensées, c’est un peu ce que j’avais en tête
Ah mais d'accord !
( Et pour le copain, je parlais pas de Titi, je parlais de toi héhé, ceci dit, enchanté n'est-ce pas )
Donc oui du coup, aaah d'accord.
Ben dis-moi, faut vraiment être l'élu pour aller se perdre vers Digne
ah ben oui, t'as intérêt à continuer, hein.
C'est que je viens juste de refaire mon retard, moi.
Au passage, pour ceux qui parlent pas le d'jeuns, ça se traduit comment, wesh ?
Ceskal > Élu ? Nan, juste appelé
et au téléphone, encore
gall > Huhu ! Bienvenue. Wesh, d'après ce que j'en ai compris, est une interjection qu'on peut traduire approximativement par Alors ? et qui se complète souvent par « ça va ou bien ? » - mais mes lecteurs djeunzologues me corrigeront peut-être
On veut la suiiiiiiiiiiiiteeee
Ça vient, ça vient
. Poussez pas ! 
Et bienvenue dans les com' - je crois que tu es la première "internationale"
Bon é ow, la suite là hey !
Quand est-ce que le retour dans le pays de Giono est prévu ? Et tout ça ?
moi je te lis Mister Noé, et j'attendais qu'il y ait de la matière en abondance pour me faire une grosse dose d'aventures tanaronaises
non seulment tu écris super bien, mais en plus c'est hyper palpitant: BRAVO