Le temps de me remettre de mes émotions suite à deux billets publiés ici et – sans parler des derniers commentaires de nouveaux visiteurs et je reviens à notre été dernier.

Car oui, notre jour de repos s’est achevé et il ne va pas plus être temps de se croire en vacances car cette fois c’est la bonne, nous sommes au moment crucial où nous les nouveaux allons devoir nous mettre au boulot (puisque les premiers arrivés, eux, ont déjà dans les pattes la « mise en service » de la Bergerie).

Bon, d’accord, on n’y est pas à proprement parler à l’aurore. La veille au soir, il y avait malgré la fatigue une certaine excitation chez nos jeunes amis, et ils ont eu du mal à s’endormir[1]. Et puis Michel ne conçoit pas de nous faire bosser « à la chaude » (et je ne peux que souscrire).

Donc, une bonne partie de la journée s’écoule, on aurait pu dire paisiblement si les premières vraies tensions n’en avaient profité pour s’immiscer. Lorsqu’on explique, en tentant d’être didactique et diplomate, que les tâches ménagères devront être partagées équitablement entre tous les membres de l’équipe, Murat est submergé par une bouffée de machisme : « On va pas faire un boulot de femmes » !

Elinor est mal fichue depuis un jour ou deux, et elle explose. L’altercation est brêve, mais il va falloir trouver une solution rapidement : on est a priori partis pour vivre ensemble pendant trois semaines, et on ne tiendra pas sans que tout le monde fasse des efforts. Pour l’instant, Elinor bat en retraite. Elle n’est pas ordinairement d’un tempérament explosif, mais elle se rend compte qu’elle n’est pas en état de faire face à son mal de bide ET à des désaccords de fond. Elle se rapatrie chez Michel, où elle restera convalescente pendant deux jours.

Enfin, aux environs de 16 heures, on rassemble tout le monde et…

on attaque !

Michel a pensé faire deux équipes : une équipe « déblayage » sur l’église[2], et une autre « débroussaillage » dans le cimetière[3]. Mais Aline découvre à côté de la porte[4], là où le chemin d’accès au cimetière commence, un bout de pierre qui affleure sous la motte de terre, suggérant un escalier enfoui, et se propose de déterrer les marches de pierre. Sylvie la rejoint et ce sont donc trois chantiers qui démarrent :

  • les filles aux marches,
  • Fouzi, Murat et Yasin au terrassement,
  • Amar, Boris, Michel et moi dans le cimetière[5]

Ce qui fait le plus cimetière, c’est encore la porte. En fer. Qui grince sinistrement. Pour le reste, nous avons affaire, donc, à un fouillis d’apparence parfaitement inextricable sur un terrain en forte pente. Boris et son père manipulent les machines et Amar et moi évacuons, à la fourche, la végétation vaincue. Michel y mettra le feu cet hiver – quand il ne risquera pas de provoquer un incendie.

Il faut reconnaître une chose à ce type d’activité : ce n’est pas reposant, mais extrèmement gratifiant. On VOIT immédiatement le résultat. Apparaissent ainsi peu à peu des restes de pierres tombales. On m’a fait remarquer que, sur la photo, le cimetière paraissait bien vide. C’est vrai. Il convient ici de se rappeler que ce cimetière a été à l’abandon pendant plusieurs dizaines d’années. Que les pierres tombales sont un luxe que peu de ces paysans isolés pouvaient s’offrir. Il est probable que les familles modestes de Tanaron n’avaient que de simples croix en bois sur leurs tombes – et celles-ci n’ont pas « survécu ». Chaque nom – ou quasiment – évoque à Michel et Marie des descendant, qu’ils ont rencontré il ya quarante ans ou depuis lors…

Nous aurons, si je me rappelle bien, trois jours de travail dans le cimetière avant de venir à bout de l’invasion végétale. Le lendemain il a plu. Le jour d’après un tapis de colchiques a éclos dans le cimetière. Michel dira : « Les morts nous remercient ».

Et ça me paraît pas mal pour finir le billet du jour ;-)

Notes

[1] et nous aussi, grâce à eux, grmbl…

[2] un des murs s’est partiellement écroulé sur le sentier qui arrive au village

[3] lequel est totalement envahi par une végétation aussi dense qu’épineuse – je découvre notamment ces belles saloperies que sont l’églantier et le prunellier

[4] fièrement debout malgré la défection presque unanime des murs

[5] avec les outils à moteur : débrousailleuse et tronçonneuse – et il faut bien ça !